dimanche 13 mars 2022

Wing chun et handicap : aveugles et malvoyants [partie 1]

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Aujourd’hui j’aimerais vous parler d’un projet qui est né en février 2017, soit il y a un peu plus de 5 ans et qui m’a bien occupé durant cette même année : l’enseignement aux personnes malvoyantes et aveugles à travers des stages de self-défense.
 
Article paru dans les Dernières Nouvelles d'Alsace le 25 avril 2017
 
Contexte
 
Pour une rapide mise en contexte, l’association des Aveugles et Amblyopes d’Alsace Lorraine (AAAL) avait contacté mon club de wing tsun, par le biais de Thomas L., pour savoir si nous avions déjà initié des personnes malvoyantes ou aveugles à la self défense et/ou si nous étions en capacité de proposer une telle initiation.
 
Détail amusant, l’AAAL et mon club sont dans la même rue, nous sommes donc presque voisins depuis des années, mais il aura fallu que Thomas nous contacte pour que nous nous lancions dans cette aventure et je l’en remercie car sans lui ce projet n’aurait pas existé.
 
Mon Sifu nous demandait, à nous son équipe de moniteurs, si nous souhaitions prendre contact avec eux pour monter un projet d’initiation à la self-défense. Je lui ai donc rapidement répondu que je pensais le projet viable et qu’il m’intéressait beaucoup. Il m’a donc fait confiance et demandé de prendre contact avec Thomas et de mettre une formation en place si je jugeais cela pertinent.
 
En moins d’une heure je me retrouvais responsable d’un projet ambitieux, mais surtout d’un beau projet.
 
Notre club enseigne le wing tsun, une technique de self défense dont une grande partie repose sur les réflexes tactiles, un style adéquat pour une personne privée de la vue. Bien sûr cela a ses limites, on ne peut sentir une attaque venir, mais j’y reviendrai plus tard.
 
Thomas m’a confirmé ce que je supposais de leurs attentes lors de nos premiers échanges de mails : : conseiller les personnes malvoyantes ainsi que leur enseigner des techniques simples afin qu’elles puissent se défendre en cas d’agression.
Concrètement nous étions donc davantage sur une initiation à la self-défense que sur un cours de wing tsun kung fu classique mais comme j’aime le rappeler à mes élèves, le wing tsun est de la self défense, du premier au dernier geste.
 
Première rencontre avec l’AAAL
 
Pour cette première rencontre, je conviais Véronique qui était alors secrétaire du club. Non pas pour prendre des notes à ma place, mais parce qu’elle pouvait avoir des remarques ou des questions auxquelles je n’aurais pas pensé. J’étais le plus disponible et motivé pour gérer ce projet, cela ne signifiait pas que j’avais l’intention de me l’accaparer et d’empêcher qui que ce soit de participer. Bien au contraire, je suis pour l’échange dans la conception de projets et la mutualisation des compétences dans leur mise en œuvre.
 
Thomas cherchait avant tout des activités à proposer aux adhérents de son association et ceux-ci lui avaient fait part du souhait de participer à une formation sur la self-défense.
Durant nos échanges j’expliquais également à Thomas que notre art martial possédait des sections chi sao, c’est-à-dire "mains collantes" qui mettaient en œuvre des réflexes tactiles et qu’il était parfaitement possible de pratiquer les yeux fermés ou en étant mal ou non voyant.
Plutôt que de lui décrire verbalement ce en quoi cela consistait, je me suis levé et avec Véronique nous avons effectué l’une des sections chi sao de notre école, moi les yeux fermés, elle les yeux ouverts, afin qu’il puisse mettre une image sur ce que je lui avais décrit. Véronique, est également pratiquante de wing tsun depuis plusieurs années.
 
Nous avons au terme de cette réunion fixé une date pour un premier stage et convenu que je lui transmette un court synopsis du stage afin qu’il puisse le transmettre aux adhérents.
 
Au final voici ce que nos échanges ont donnés :
Nous serions pour le moment sur 15 à 20 stagiaires avec une moyenne d’âge tirant vers les 50 ans. Il pourrait y avoir des accompagnants voyants, mais rien de sûr. A priori il n’y aura pas de chien guide.
Le stage se déroulerait dans notre salle sur une durée de 2 heures environ pour un stage orienté principalement self-défense, mais avec un peu de chi sao qui apporterait un plus à la self défense.
 
Point très agréable pour nous, durant l’entretien Thomas nous a confié qu’il n’a jamais eu autant de réponses aussi vite de la part des non-voyants, ce qui est plus qu’encourageant ! Mais démontre également un besoin réel, ce qui me préoccupe et me donne d’autant plus envie de faire ce stage afin d’apporter ma petite pierre à l’édifice quant à la sécurité de chacun.
 
Je pense réellement que les petites actions concourent à rendre le monde meilleur et que chacun de nous peut aider à faire bouger les choses dans le bon sens.
Il ne s’agit pas juste de self-défense, des fois c’est juste aider ceux qui en ont besoin, alors j’essaye d’aider en fonction de mes capacités.
 
Préparation du stage
 
Pour préparer le stage, le tout n’était pas de simplement décider de ce que nous allions pratiquer, mais il fallait également que je trouve la façon idéale de le transmettre. L’enseignement passe en général par trois biais : l’explication verbale (ce qu’on entend), le visuel (ce qu’on voit) et le ressenti (ce qu’on ressent). Pour ce stage, je ne pouvais pas m’appuyer sur le visuel, il était donc capital de vraiment insister sur le verbal et de travailler mes explications pour verbaliser tout ce qui ne pourrait être vu.
 
Une de mes camarades du club, Nathalie, avait proposé qu’un élève se bande les yeux et que je lui donne mes explications, mais cette solution ne me plaisait pas. En effet l’élève connait déjà les techniques que nous allions étudier, ainsi cela fausserait-il l’exercice. J’ai donc porté mon choix sur deux profanes en termes d’arts martiaux, mon père et ma petite amie.
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