dimanche 15 janvier 2017

Les doubles couteaux dans les arts martiaux en Chine du sud [partie 2]

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Texte de Benjudkins, traduit et adapté par Véronique

Qu’est ce qui caractérise le hudiedao ? Qu’est ce qui le différencie d’autres lames utilisées par paires ?
Hudiedao, wu dip do, bat cham do, shuang dao, couteaux papillon… ces armes portent des douzaines de noms différents ! Toutefois elles ont des points communs, mais quels sont-ils ? Et qu’est ce qui les différencie des autres armes utilisées par paire dans les arts martiaux chinois ?

Il est intéressant de constater que le terme hudiedao ou couteau papillon n’apparaît jamais dans les textes anglais du XIXe siècle du moins dans tout ce que j’ai lu sur le sujet. Invariablement on y parle de double épée. Une caractéristique retrouvée assez systématiquement est que les deux lames sont rangées dans un fourreau unique. Certains textes (mais pas tous) parlent de la garde en forme de D et décrivent la forme générale de la lame. J’ai utilisé les textes les plus détaillés (des années 1830) ainsi que les gravures et photos des années 1840 et 1850 pour tenter d’interpréter et compléter les descriptions succinctes des années 1820.

Certains collectionneurs étaient très intéressés par la culture chinoise et utilisaient des agents locaux pour les aider à acheter et  répertorier  leurs pièces. Ce sont ces Européens qui, pratiquement sans exception, appelaient ces armes des “couteaux papillon”.
J’ai consulté deux dictionnaires anciens qui comportaient des termes militaires. Aucun ne répertoriait le mot hudiedao, par contre, pour ce qui concerne les doubles couteaux ils donnaient le mot shwang koo keem, ou, en pinyin moderne  shuang goo gim (Medhurst, English and Chinese Dictionary 1848 ; Morrison, Dictionary of the Chinese Language, 1819).

De nombreux romans chinois anciens, y compris “La Légende des 3 Royaumes”  écrit par Luo Guanzhong au XVe siècle d’après l’œuvre de Chen Shou écrite au IIIe siècle  et “Au Bord de l’eau” de Shi Nai’an, parlent de protagonistes utilisant des doubles couteaux, cela implique que même des personnes ne pratiquant pas les arts martiaux en connaissaient l’existence. En fait l’héritage littéraire de ces deux romans à lui seul pourrait fort bien expliquer l’engouement de ces lames dans l’imaginaire des artistes martiaux du XXIe siècle.

En langage martial moderne, le mot “double couteau” se réfère à deux lames de taille moyenne qui sont rangées dans un seul fourreau. Elles devinrent extrêmement populaires à la fin du XIXe siècle et sont toujours utilisées de nos jours. Du fait qu’aucun de ces types d’armes n’a jamais servi dans le monde militaire, il ne leur a jamais été attribué de nom officiel. Par contre nous avons pléthore de noms plus ou moins poétiques donnés par les civils ou les artistes martiaux.

Exemple de hudiedao à garde en S, mesurant 45 cm de long
Les hudiedao étaient fabriqués par les forgerons locaux et avaient, par conséquent, diverses formes et diverses utilisations. Certains ont une garde très lourde en forme de D faite en cuivre, d’autres auront une garde en acier. Parfois la garde est en forme de S et dans de très rare cas il n’y a pas de garde du tout.
Il en va de même des lames à proprement parler. Mais deux types ressortent du lot. Certaines sont longues et étroites avec une section triangulaire, elles ressemblent un peu à des rapières européennes qui auraient été raccourcies et étaient clairement destinées à l’estoc. D’autres sont plus larges et plus lourdes avec une pointe robuste. Si elles pouvaient toujours servir à transpercer d’épais vêtements ou des vêtements de cuir, elles pouvaient aussi servir pour la taille.


Hudiedao du milieu ou de la fin du XIXe siècle,
mesurant 49 cm de long. Les pointes sont manquantes.
La plupart des hudiedao du XIXe siècle (environ 70%) semblent avoir une longueur de 50 à 60 cm. Vu leur taille il est clair qu’ils n’étaient pas destinés à être portés “discrètement” si on ajoute le fait qu’ils étaient surtout utilisés par les mercenaires (appelés des “braves”) ou des milices locales, il n’y avait aucune raison de les cacher. Au contraire. Le fait de voir ou d’entrevoir cette arme donnait une indication claire de la personnalité de son porteur.
On peut aussi rencontrer des modèles ayant la forme et la moitié de la taille d’un dao en queue de bœuf, très populaire parmi les artistes martiaux civils au XIXe siècle. Dans ce cas les lames étaient parfois très décorées.

Enfin il y a des lames plus courtes, plus épaisses, fabriquées pour couper et hacher.  C’est ce qui ressemble le plus au modèle utilisé par les personnes pratiquant le wushu et les artistes martiaux modernes. Certaines de ces armes pouvaient être portées cachées, elles sont mieux équilibrées et ont une pointe plus solide que les imitations  de piètre qualité que l’on trouve de nos jours. Et il est intéressant de remarquer que ces lames plus courtes, qui ont un aspect plus “moderne” sont finalement bien moins communes à l’époque que les autres types susmentionnés.
Les fourreaux étaient pratiquement toujours faits en cuir, et ne contenaient pas de séparation intérieure pour chaque lame (chose qui peut être parfois vue dans les doubles lames du nord)
Je n’ai pas réussi à déterminer quand le terme “hudiedao” est entré dans le langage commun.
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